17 Mar
17Mar

Mes élucubrations sont nées à la lecture de textes inscrits au musée de l’archéologie de Bogota.


 Lorsque nous visitons un Musée, nous admirons toutes ces pièces qui ont été exhumées du sol, de tombes, que veulent-elle dire ? …..Nous ne vivons pas dans les temps anciens. L’archéologie, pour découvrir les us et coutumes de nos grands anciens, est une science qui s’exerce au présent. 

De nos jours, dans notre présent fugitif, les liquides qui remplissaient les récipients trouvés dans les fouilles, ont disparus, les vêtements que portaient ces corps retrouvés été exposés dans les musées n’existent plus, les chansons qui étaient chantées lors des réunions dans les communautés n’ont pas survécu au temps qui est passé. De même, les odeurs que respiraient ces hommes et ces femmes dans les temps anciens se sont évaporées, comme les paroles, les instructions, les discours, les incantations …. Comment les objets étaient vraiment utilisés ? Pourquoi une jarre a 3 orifices, y-avait-il une corde tendue entre les extrémités de cet objet, était-ce un instrument de musique, un outil ???? 


Et pourtant chacune de ces pièces retrouvées portent en elle quelques traces de leur usage, une trace de liquide, quelques filaments de vêtement, parfois une trace d’odeur … Mais quelle frustration subit l’archéologue de ne pas en découvrir plus. L’avancée de notre science moderne, rayon X, datation carbone, microscope, nous donne des indices supplémentaires … En utilisant un objet, un instrument, comme ils auraient pu être utilisés dans ces temps anciens, l’archéologue en apprend un peu plus … 

Certains de ces indices sont directs, c’est-à-dire des représentations directes de vêtements, par exemple : ou des traces chimiques de leur contenu ; d’autres que nous pouvons ressentir lorsque nous prenons une Ocarina et la faisons sonner - comme d’autres l’ont fait à d’autres époques. D’autres sont plus subtils même, par exemple, les associations que nous faisons entre les monstres hybrides incarnés dans les figures d’argile, de bronze ou d’or, et ce qu’on connait du rôle que jouaient les substances psychotropes dans la vie des populations précolombiennes. 


Lors d’une exposition de ces objets, l’évènement le plus important est peut-être notre ressenti lorsque nous découvrons ces pièces exposées, en fonction de nos propres expériences, croyances, et pour plein de raisons personnelles, qui amalgame le passé exposé à notre propre présent.


 Chacune de ces pièces exposées a été fabriquée par quelqu’un. C’est évident ! Mais par qui ? Et pourquoi ? 

Chaque objet est le résultat d’un croisement entre le matériau (argile, métal, bois, etc…), l’expérience de son concepteur, et sa destination. Tantôt l’expérience de l’artiste relevait de l’expertise, tantôt, il était industriel et fabriquait des pièces en série, ou c’était celle d’un apprenti. Les archéologues feront la différence … 


Cela mérite réflexion. Que savait celui qui a fait telle ou telle tâche ? Pourquoi un artiste expérimenté plutôt qu’un apprenti pour faire cette « citrouille » en céramique qui parait bien simple ? 


Regardons par exemple « l’homme animal » : ses oreilles sont énormes, ses bras sont courts, il est bedonnant, ses yeux sont exorbités, et ses lèvres sont sur le point d’éclater …. Il a des crocs, et semble avoir un masque. Est-ce un homme déguisé en animal ? Y-a-t-il plus qu’un déguisement ? Est-ce une créature capturée dans la boue, modifiée par l’imagination de l’artiste ? Un monstre venant d’un autre monde, créé par des substances psychotropes ? Ou est-ce un héros ? un Dieu ? 


Nos grands anciens ont créé les choses sont à l’image des humains : les aiguilles ont des yeux, les tasses ont des oreilles, les bouteilles une bouche. Les hommes et femmes se représentait le monde comme leur corps, comme s’ils formaient une entité unique, en symbiose totale. 

Un récipient en céramique, par exemple, peut avoir, non seulement une bouche – tous les récipients ont une ouverture – mais une ouverture spécifique pour chaque action : une ouverture pour recevoir le liquide, d’autres ouvertures si le récipient doit passer de bouche en bouche, une ouverture différente si le liquide est une offrande pour un Dieu, s’il doit protéger une maison, …, peut-être une bouche qui s’ouvre pour « crier » ou appeler à l’aide des esprits supérieurs ?


Beaucoup de ces objets émettent des sons, une musique. Les mélodies exactes pour lesquelles ces objets ont été fabriqués ont été perdues. Mais nous avons toujours certains sons, certaines textures, et nous pouvons retrouver le goût de l’argile cuite dans la bouche (en soufflant dans cet objet) ..

 Certains instruments ont pu résonner à nouveau, entre les mains d’experts d’aujourd’hui. Encore une fois, passé et présent se mêlent. Le souffle d’aujourd’hui, les mains de notre époque, redonnent vie à ces objets, avec patience, imagination, doucement. 

Mais sommes-nous dans le vrai ? Est-ce que notre présent ne nous entraine pas dans une voie erronée ? 


Les pièces présentées dans les musées semblent souvent inertes, et peut-être est-ce l’impression qu’elles donnent ! Mais inévitablement, chacune de ces pièces se rapportent à des éléments de vie du passé, elles ont servies, senties, été utilisées, montrées, elles ont déclenché peur, admiration, ont-elles réconforté, rassuré, protégé…. , été détestées, etc… et aujourd’hui, peut-être veulent-elles partager avec nous une partie de leur vie ? 

Les artistes ne pensaient-ils pas que ces objets qu’ils fabriquaient avaient des émotions similaires à celles des humains ? Au point que ces objets ressemblaient à des humains ? 

Ces objets sont le reflet des émotions ressenties par des centaines d’hommes et de femmes que nous ne rencontrerons jamais et dont nous savons si peu de choses …


 Les urnes funéraires sont des artefacts liés aux rites de la mort. Sont-elles là pour aider le mort à passer dans un autre monde ? pour que les vivants se souviennent et ressentent la présence de cet être disparu ? Pour continuer à inspirer crainte, respect ? 

Certaines pourraient être assimilées aux photos qu’on trouve sur certaines tombes, représentant le disparu, patriarche, matriarche, enfant. Sur d’autres urnes, assiste-t-on à une représentation sculpturale d’une tradition culturelle, qui, ainsi, perpétue la tradition dans la mémoire de la communauté ? Est-elle destinée aux mineurs pour apprendre ? 


Les rouleaux en céramique sont à déplacer, à rouler pour imprimer leur dessin, ou à sceller. Ils reproduisaient des motifs particuliers qui avaient certainement une signification particulière. Ils n’étaient pas indélébiles, servaient-ils pour une occasion particulière ? Le mystère autour de ces dessins reste entier. Ils étaient appliqués sur des textiles, sur la peau… Très peu d’histoire à leur sujet, et aujourd’hui, notre imagination ne nous indique pas comment ils étaient utilisés et quels étaient leurs fonctions … 

Il y a quelque chose dans un tampon ou un rouleau de céramique, pourrait-il imprimer sur la peau du récipiendaire une promesse d’action ? Est-ce un signe pour donner dynamisme, retirer la crainte d’un évènement ? Est-ce un passeport, un signe de reconnaissance, un signe de guerre ? 

Un signe immobile qui permet de sentir l’avenir ? et d’être prêt à s’y confronter ? 


En résumé, que savons-nous vraiment de la manière dont vivaient nos grands anciens ? Est-ce la réalité ou un mélange du présent, appliqué à ce que nous voyons du passé, que notre imagination modèle ?

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